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05/05/2015 : Rencontre avec Despinas et Evangeli, autour de la lutte des femmes de ménage du ministère de l’économie et des Finances grec.

Rencontre le 30 avril 2015 avec Despinas Kostopoulou et Evangeli Giannaki,
2 des 595 femmes de ménage du Ministère de l’Economie et des Finances grec.

22 mois de lutte pour leur réintégration.

C’est à l’Union Locale CGT de la Rose (13ème 14ème ardts de Marseille) qu’une rencontre a été organisée le 30 avril 2015 entre Despinas, Evangeli et les syndiqué-es CGT des secteurs du nettoyage, mais aussi de la CAF, de l’AFPA,... et des Finances publiques.

Faire payer la crise aux plus faible, c’est ce qu’a mis en œuvre la « Troïka » (FMI, BCE et commission européenne) en Grèce en 2010. Un programme de prêts en échange d’un premier protocole d’accord.

Ainsi commença la spirale infernale de diminution des retraites, des salaires, d’augmentation des impôts, des licenciements et des privatisations pour aboutir à une crise humanitaire : la Troïka avait pris possession des lieux.

Le ministre des finances grec sous l’autorité de Papadimos, soucieux de montrer l’exemple dans la purge qu’il engageait dans tous les services publics, décidait de s’attaquer aux femmes de ménage du ministère, aux salariées les plus précaires, les plus faibles, certain qu’il était de leur résignation. Mise d’office en position de disponibilité, plus de travail du jour au lendemain.

Pensez donc ! 595 femmes de ménage, éparpillées un peu partout en Grèce, dans les services du ministère, travaillant 4 h 00 par jour, âgées entre 40 et 60 ans pour la plupart, très peu organisées avec leur syndicat, cela allait être facile, tranquille, personne ne se soucierait d’elles ! Et dégraisser des femmes de ménage, quel signe fort et délicieux d’allégeance adressé à la Troïka...
Sauf que ce sont les femmes de ménage qui se sont souciées d’elles-même ! Et ça, ce n’était pas prévu !

Elles sont une dizaine dans un premier temps qui viennent protester devant les locaux du ministère de finances à Athènes nous explique Depinas. Plusieurs heures par jour et tous les jours. Puis 20, puis 30, puis... une cinquantaine tous les jours ! Aucun « officiel », aucun membre du cabinet ministériel n’échappe à leur interpellation, à l’entrée, à la sortie, elles sont là.

Médiatiquement, c’est le black-out. Les forces de Police viennent les déloger et les cognent. (certaines d’entre-elles subissent encore aujourd’hui les conséquences dans leur chair des coups portés).

C’est la venue des représentants de la Troïka qui va enfin braquer les projecteurs sur leur lutte.
Le « barrage des femmes de ménage » va désormais symboliser les luttes et la résistance des grecs à la politique d’austérité imposée. Obligés de s’enfuir par les sous-sols du Ministère, les membres de la Troïka découvrent le concret de l’austérité, des femmes, fatiguées mais pleine de vie, qui ont décidé de ne pas subir.

Despinas et Evangeli nous expliquent le soutien de la population, du syndicat mais aussi celui indispensable de leur famille, du conjoint, des enfants et surtout peut-être, celui des parents qui aident leurs filles en lutte qui désormais vont camper jour et nuit devant le ministère...
Car il faut continuer à se nourrir, se laver, se soigner : la lutte est déjà longue, elle va durer. Et Evangeli nous indique qu’avec la retraite de ses parents de 900 euros pour deux, une fois que les frais de santé ont été payés, il reste 500 euros pour vivre avec elle qui est à leur charge...

Dignité : c’est cela qu’elles ont conquis nous expliquent-elles, malgré un gouvernement qui joue non seulement le pourrissement mais qui veut aussi les briser en embauchant des sous-traitants payés entre 1,5 et 2 euros de l’heure pour briser leur « grève », ou plutôt leur lutte, puisqu’elles sont en « disponibilité » !
Toujours soutenues par leur famille et leur syndicat, les meneuses doivent aussi affronter la répression politique et judiciaire ; elles sont poursuivies en justice.

Loin de se refermer sur leur lutte, la solidarité concrète, c’est aussi participer avec d’autres à l’indispensable solidarité.
C’est ce que vont faire Evangeli et Despinas en s’investissant avec des dizaines d’autres femmes de ménage dans l’association « Solidarité pour tous », qui vient en aide pour porter assistance aux plus démunis, à celles e ceux qui n’ont plus les moyens de se soigner.

Cette lutte qui continue, et toutes celles menées depuis plusieurs années en Grèce va aussi nourrir la possibilité d’autres choix économiques, sociaux et politiques.
Ce sont ces luttes et ces solidarités, qui ont permis à Syriza de gouverner aujourd’hui. Siryza qui présente une loi de réintégration des femmes de ménage au sein du Ministère de l’économie et des finances grec.

Une alternative de progrès qui doit faire face à l’hostilité des exilés fiscaux grecs, et d’une Troïka qui veut ruiner cette expérience grecque, légitime, démocratique, sociale mais tellement dangereuse pour le libéralisme économique et les politiques d’austérité qui nous sont imposées.

Ce 1er mai, nos camarades grecques ouvraient le cortège syndical à Marseille.
1er mai, journée internationale de solidarité et de lutte des travailleurs. Elles y étaient et nous aussi, avec les Moulins Maurel, les SNCM, les Nexcis, les Total...

Article publié le 5 mai 2015.


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