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25/01/2023. Derrière la contre-réforme des retraites, la remise en cause de la répartition et d’un régime à prestation définies.

Après une première tentative de réforme stoppée par les mobilisations sociales et la pandémie de Covid en 2020, le gouvernement français repart à la charge sur les retraites en janvier 2023. L’objectif de sa réforme est de repousser l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans, et d’augmenter le nombre de personnes qui vont devoir cotiser 43 annuités.
Loin d’être une réforme « d’équilibre, de justice et de progrès », elle va contribuer à aggraver les inégalités.

La première injustice de cette réforme, c’est qu’elle va s’abattre le plus durement sur les personnes les plus pauvres et aux métiers les plus précaires.

A l’âge actuel de la retraite, ¼ des hommes les plus pauvres sont déjà morts, contre 6% des plus riches. L’institut de la statistique a découpé la population en vingt catégories selon le niveau de vie, des plus modestes aux plus aisés. Dans la catégorie des 5% les plus pauvres (avec 460 euros de niveau de vie par mois), il ressort que 75% des hommes sont encore en vie à l’âge de 62 ans ; et donc 25% sont effectivement déjà morts.
A l’autre extrémité de l’échelle sociale, chez les 5 % les plus fortunés (avec 5 600 euros par mois), 95% des hommes sont encore en vie à 62 ans ; seuls 5% sont déjà décédés.

Avec un âge légal de départ à 64 ans, 1/3 des plus pauvres seront déjà morts. 1/3 des plus pauvres, qui ont souvent les métiers les plus difficiles et les plus pénibles, et qui vivent quotidiennement les difficultés et contraintes de la pauvreté, auront cotisé toute leur vie pour payer la retraite des générations précédentes, alors qu’eux même n’en profiteront jamais. Entre les hommes les plus pauvres et les plus riches, l’écart d’espérance de vie est de 13 ans ( sources INSEE).

D’après la DREES, en France, 1,4 million de personnes âgées de 53 à 69 ans ne perçoivent ni revenu d’activité ni pension de retraite.

Ce sont en majorité des femmes, en moins bonne santé, moins diplômées. Le taux de pauvreté dans cette catégorie atteint 32%. On sait déjà quel a été l’impact du décalage de la retraite de 60 à 62 ans : entre 125 000 et 150 000 personnes supplémentaires bénéficieraient d’une pension d’invalidité entre 60 et 62 ans, et environ 80 000 personnes supplémentaires seraient allocataires de l’un des trois principaux minima sociaux.

Repousser l’âge de départ à la retraite augmenterait encore le nombre de personnes nécessitant une pension d’invalidité ou des minima sociaux, qui ne permettent qu’un niveau de vie très faible.
Pour les « seniors » dans ce « sas de précarité » entre l’emploi et la retraite, le gouvernement a déjà réduit la durée des indemnisations chômage : cette classe d’âge retrouve très difficilement un emploi après en être sortie, elle vient de voir la sécurité de l’assurance chômage diminuer, et elle va maintenant probablement rester dans cet état plus longtemps si ce projet va à son terme.

Cette réforme va donc précariser les plus âgés du monde du travail, tout en pénalisant les plus jeunes.
En effet, si les séniors restent en emploi plus longtemps, ils libèrent des postes plus tard, ce qui ne laisse pas de place en bas pour celles et ceux qui sont en recherche d’emploi et pourraient rentrer dans l’entreprise.

Et derrière une façade féministe, la précarisation des femmes :
En France, actuellement, les pensions de droit direct des femmes sont inférieures de 40% à celles des hommes.
Cela s’explique à la fois par des salaires inférieurs à ceux des hommes, une forte part de métiers à temps partiel et par des carrières plus souvent hachées par le soin non-rémunéré, notamment auprès des enfants. Ces inégalités ne s’expliquent pas uniquement par les congés parentaux, ce qui rend leur prise en compte dans le calcul de la retraite en grande partie inefficace face à l’ampleur des inégalités.

Mobilisés comme dans d’autres secteurs et conscients comme près de 80 % de la population Française que cette 8ème réforme ne se justifie pas par une quelconque impasse financière.

L’audition du 19 janvier du président du Conseil d’Orientation des Retraites par la Commission des Finances de l’Assemblée apporte sur ce point, s’il en était encore besoin, un démenti flagrant que nombre d’économistes avaient déjà souligné.

Le pouvoir ment et cache les véritables raisons de cette attaque contre une des principales conquêtes du monde du travail : la retraite par répartition à prestations définies.

Il manquerait 12 milliards à l’horizon 2030 si l’on s’en tient aux hypothèses les plus pessimistes et vraiment il n’y aurait pas moyens de trouver de nouvelles recettes ?

Pourtant, quand il s’agit d’arroser les grands groupes d’argent public sans aucune contrepartie, là les milliards apparaissent comme par magie. 157 milliards chaque année pour être précis.

C’est le coût du capital dont on ne parle jamais.

157 000 000 000 d’euros. Un chiffre choc révélé par des chercheurs du Centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques (Clersé) de l’université de Lille à la demande de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires).

De l’argent public dilapidé sans aucune contrepartie et qui finit donc dans les poches des actionnaires : 80 milliards d’euros de dividendes et de rachats d’actions en 2022, un record absolu.

Le dernierrapport OXFAM en dit long sur les motivations et conséquences des politiques Macroniennes.

Durant le premier quinquennat Macron, ce sont 15 milliards de recettes fiscales par an qui ont été abandonnées du fait d’une première vague de suppression des impôts de production.
Dès 2023, il remet le couvert en annulant 8 milliards par an au titre de la suppression de la Contribution Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE).

Entre 2009 et 2022, le patrimoine des milliardaires a bondi de 439 % en France. En Allemagne, ce chiffre n’est « que » de 175%.

La France, un « enfer fiscal », vraiment ? On se moque du monde.

Avec Emmanuel Macron au pouvoir, les assistés d’en haut peuvent dormir sur leurs deux oreilles.
« Le président des ultrariches », a eu le temps d’être généreux avec eux : suppression (très) rapide de l’ISF, flat tax sur les revenus du capital, suppression de l’exit tax…

Et comme le précisait récemment l’économiste Gabriel Zucman :« La France est un paradis fiscal :2% d’impôt seulement pour les 380 familles les plus riches ». Il indiquait notamment : « les milliardaires français ne paient quasiment aucun impôt sur le revenu parce qu’ils peuvent se payer des dividendes qu’ils gardent dans leurs sociétés holding, donc ils ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques, il n’y a plus d’Impôt Sur la Fortune (ISF). […] Si vous regardez les taux effectifs d’imposition pour les très très grandes fortunes françaises, les 380 ménages aux revenus les plus élevés donc les 0,001%, leur taux effectif d’impôt sur le revenu, c’est de l’ordre de 2% ». La France est un paradis pour les milliardaires.

Et si l’on se penche sur la question des recettes des régimes de retraite, on constate qu’avec 1 point de cotisation supplémentaire ce sont 15 milliards de recettes pour les régimes de retraite, l’assujettissement des différents éléments de la rémunération (intéressement dans le privé, primes dans le public….) ce sont 6 milliards de recettes supplémentaires tout comme une véritable politique d’égalité salariale Femmes/Hommes qui rapporterait à elle seule 5 milliards .

En résumé : de l’argent magique il y en a, et à foison, quand il s’agit d’arroser les (grandes) entreprises. Et ce sans aucune contrepartie, c’est la fête : arrosez les actionnaires avec, continuez à licencier.

Par contre, pour la plèbe qui ose réclamer 12 milliards pour ne pas travailler 2 années supplémentaires après avoir charbonné toutes leurs vies ? Circulez, y a plus d’argent dans les caisses.

Vous reprendrez gentiment 2 années supplémentaires sans broncher. Et ce, pour que le gouvernement puisse continuer ses cadeaux au capital.

Prendre au travail, donner au capital, telle pourrait être la devise du gouvernement.

Avec Emmanuel Macron ce n’est pas travailler plus pour gagner plus, c’est travaillez plus pour gaver plus.
Ceux qui ne sont rien pourront bien travailler 2 ans de plus pour financer les cadeaux aux assistés d’en haut ?

80% des Français sont opposés à sa retraite à 64 ans. Un mouvement historique s’était déjà levé dans le pays et avait bloqué sa réforme des retraites avant l’arrivée du Covid. Le contexte économique est encore pire, l’inflation attendue par l’INSEE devrait grimper à 7% en janvier. Mais toujours pas d’indexation des salaires sur l’inflation, toujours pas de blocage des prix, toujours pas de taxation des super-profits.

157 milliards d’un côté, même pas 12 milliards de l’autre ? Cette contre réforme des retraites est profondément, violemment, cruellement injuste.
De même les attaques incessantes et répétées contre les biens communs, le service public, sont marquées du même sceau : favoriser le capital, marchandiser tout ce qui peut l’être.

C’est cette politique qui a conduit à l’effondrement de l’hôpital public avec 103 000 lits d’hospitalisation détruits en 25 ans, 21 000 durant le dernier quinquennat et en pleine pandémie.

C’est cette politique qui a conduit à la destruction massive d’emplois dans nos services.
50 000 emplois supprimés depuis 2002.

Le Ministre du travail Ambroise Croizat déclarait en 1945“Il faut en finir avec la souffrance, l’indignité et l’exclusion. Désormais,nous mettrons l’homme à l’abri du besoin. Nous ferons de la retraite non plus une antichambre de la mort mais une nouvelle étape de la vie.”
Cette citation est plus que jamais d’actualité.

Le 19 janvier dernier 43 % des agents de la DRFIP 13 étaient en grève et dans la rue pour combattre la plus grande régression sociale des trente dernières années : la réforme des retraites du gouvernement du capital et de la finance Macron-Borne.

Rendez-vous à toutes et tous dans la grève et dans la rue le 31 JANVIER.

10h 30 Marseille Vieux-Port
10h30 Arles Kiosque à musique
Toutes et tous ensemble pour défendre nos conquêtes sociales.

Article publié le 25 janvier 2023.


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