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07/10/2021. Pandora Papers in la Marseillaise. Interview de la CGT Finances publiques 13

Quel est le point commun entre la chanteuse Shakira, Dominique Strauss-Kahn, le roi de Jordanie, Abdallah II ou encore le mannequin allemand Claudia Schiffer ? Tous sont cités dans la retentissante affaire des « Pandora Papers » (lire notre article du mardi 5 octobre). En bref : des révélations sur des montages financiers labyrinthiques qui échappent à l’impôt et à toute transparence où l’on retrouve plusieurs personnalités françaises.

Il n’en fallait pas plus pour que Bruno Le Maire fasse mine d’ouvrir les yeux sur le phénomène et demande mollement à la direction générale des Finances publiques de « vérifier si des résidents fiscaux français ont fraudé ». « C’est bien la moindre des choses, le minimum », répondent en cœur Philippe Laget et Frédéric Larrivée, deux secrétaires CGT des Finances publiques des Bouches-du-Rhône. Si la somme totale de cette fuite d’argent est encore sujet à débat, l’OCDE estimait en 2019 que le montant des actifs détenus à l’étranger par les résidents d’une centaine de pays s’élevait à 10 000 milliards d’euros. Soit 11 300 milliards de dollars dissimulés qui échappent à l’impôt de leurs pays d’origines. Précision importante : on parle ici de la valeur des biens dans les paradis fiscaux et non du montant de la fraude fiscale directe. Mais dans tous les cas, cette somme paraît gigantesque. Alors que finance-t-on avec tout cet argent ? « Selon la fédération publique hospitalière, la création d’un hôpital public moyen de 20 000m2, on parle ici uniquement du bâtiment, est de 33 millions et des brouettes d’euros, on a donc de quoi faire », répond Frédéric Larrivée. Même principe pour la rénovation des écoles de Marseille, estimée à 1,2 milliards d’euros. Autre chiffre pour un ordre d’idée : la dette des hôpitaux publics s’élevait à 30,5 milliards d’euros en 2018, avant les différentes annonces de reprise d’une partie de la dette par l’État.
« 15% du PIB mondial »

Enfin, Philippe Laget note qu’avec cette somme « il n’y aurait plus de supposés problèmes pour le système de retraites ». Même le plan de relance européen suite à l’épidémie de Covid-19, pourtant doté de 750 milliards d’euros, paraît minuscule face au 10 000 milliards d’euros de bien dissimulés. Au niveau mondial, le sénateur communiste du Nord, Éric Bocquet (lire entretien ci-dessous) estime que « c’est presque 15% du PIB du monde. L’humanité produit environ chaque année 80 000 milliards de dollars. C’est un pourcentage non négligeable qui est à l’ombre ». De quoi questionner la politique fiscale française, européenne et même mondiale. « C’est hallucinant à l’échelle d’une vie humaine pour un couple qui s’échine à rembourser jusqu’au dernier euro la voiture ou le logement qu’il achète. Ça dépasse l’entendement, ça peut dans un premier temps susciter l’indignation mas ça peut aussi susciter la résignation. Alors qu’il faudrait une décision politique en faisant un enjeu majeur, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui », s’indigne Éric Bocquet (lire également ci-dessous). Ce n’est pas les syndicalistes des Finances publiques qui le contrediront. « L’argument principal des libéraux, disant que si on taxe les riches, ils partent, est erroné car on voit ici qu’ils sont déjà partis en réalité », tacle Frédéric Larrivée.

Il pointe également le fait que l’Union européenne est pour le moins laxiste avec les paradis fiscaux. Preuve en est qu’elle a retiré de sa liste noire des paradis fiscaux l’Anguilla, la Dominique et les Seychelles, ce mercredi 6 octobre. Deux jours après la publication des Pandora Papers, et alors même que les Seychelles sont largement évoquées par l’enquête.

Reste la question de la lutte contre ce phénomène tant il paraît intouchable. « On en est à la 13e révélation de ce type. Offshore Leaks, Panama Papers, Paradise Papers, etc... C’est bien la confirmation qu’on est en face d’un problème systémique », tonne Éric Bocquet. Les deux syndicalistes des Finances publiques proposent une solution simple pour remédier à cette optimisation fiscale : « Taxer là où le chiffres d’affaires et les bénéfices sont réalisés. »

Article publié le 7 octobre 2021.


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